L’affaire Volkswagen, soubresaut d’un modèle économique condamné qui refuse de mourir

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Les réactions à la fraude au CO² de Volkswagen est symptomatique de la fin du modèle capitaliste en Europe.

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Volkswagen a osé ! A l’heure du tout écolo, leur logiciel de vérification des rejets CO² des moteurs diesels trichait volontairement ! Cette fraude met en lumière le manque d’implication de nombre de grosses structures dans ce qui s’appelle la responsabilité sociétale et environnementale (RSE). Pourtant chaque entreprise cotée en Bourse doit publier un rapport extra-financier depuis 2001.

La responsabilité sociétale et environnementale

La responsabilité sociétale et environnementale est un concept apparu dans la littérature dans les années 60, développé dans les années 90 avec même en 2010 la création d’une norme ISO26000. Cette notion devient de plus en plus prégnante et passe avec ce scandale sur le devant de la scène médiatique.

Elle couvre un large champ puisqu’elle correspond à la responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur l’environnement, donc se traduisant par un comportement transparent et éthique qui contribue au développement durable (y compris à la santé et au bien-être de la société). Elle prend en compte les attentes des parties prenantes, respecte les lois en vigueur et est compatible avec les normes internationales. De plus elle est intégrée dans l’ensemble de l’organisation et mise en œuvre dans ses relations.

Selon la norme ISO26000 « Pour définir le périmètre de sa responsabilité sociétale, identifier les domaines d’action pertinents et fixer ses priorités, il convient que l’organisation traite [toutes] les « questions centrales » suivantes : la gouvernance de l’organisation, les droits de l’homme, les relations et conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques, les questions relatives aux consommateurs et enfin les communautés et le développement local. »

Le champ est donc vaste et réellement orienté vers le coût non économique des décisions pour la société civile. Le volet environnemental va donc porter sur la protection des ressources naturelles, la préservation de la biodiversité et la lutte contre la pollution et les changements climatiques, avec une réduction de l’empreinte écologique en termes de consommation énergétique, déplacement professionnel et gestion des déchets.

Il existe des formations universitaires niveau Master 2, ainsi que des formations continues délivrées en intra ou inter entreprise pour permettre la mise en place de cette RSE. Entre 60 et 100 cursus sont disponibles allant de la simple sensibilisation au parcours complet. La question n’est donc pas la formation mais bien la volonté politique des dirigeants d’entreprise !

Un conflit de modèle de sociétés révélé par la RSE

Un défaut majeur de nos sociétés évoluées occidentales est le contrôle de ces dernières par des instances régulatrices décisionnaires. Ces organisations sont le lieu d’une lutte de pouvoir interne à une entreprise ou groupe où l’aspect dominant est généralement l’impact financier en gain ou manque à gagner que ce type de décision peut faire prendre. Le défi va être dans la mise en place d’un contrôle par des instances officielles… incorruptibles !

Nous sommes actuellement dans une période de transition entre le monde capitaliste bien connu de l’argent roi et un modèle de société post-capitaliste plus respectueux et plus solidaire, plus collaboratif, que certains qualifieraient de « bobo ». Or, les grandes sociétés, souvent transnationales, ont été érigées sur le modèle capitaliste de l’individualisme et ont des difficultés à s’adapter à ce nouveau paradigme. Elles sont là pour générer du profit et des dividendes pour les actionnaires (modèle capitaliste) et la responsabilité sociétale et environnementale n’est pas toujours compatible avec le profit à court terme. Il suffit d’observer la migration des lieux de production vers des pays à bas coût en main d’œuvre et où les contrôles RSE sont difficiles à mettre en place…

Un modèle conceptuel, connu sous le nom de « spirale dynamique » de Clare Graves, peut permettre de comprendre cette évolution des individus et des sociétés : au cours du processus d’évolution, chacun traverse des étapes de développement, les intègre avant d’aborder l’étape suivante jusqu’à ce que de nouvelles difficultés l’obligent à inventer de nouvelles solutions qui l’amèneront progressivement à découvrir une nouvelle étape.

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Il en va ainsi pour les individus comme pour les sociétés ; les individus sont toujours en avance sur l’ensemble de la société et il faut un certain nombre de « locomotives » pour que la société dans son ensemble puisse passer progressivement au stade d’évolution suivant. Le capitalisme s’y inscrit dans le modèle « orange » de l’individualisme, le modèle respectueux de l’environnement, très collaboratif, y devient le modèle « vert » ; l’étape suivante « jaune » permettra l’émergence d’individus responsables capables de naviguer entre les différentes strates de l’évolution pour y retirer le meilleur de chaque niveau.

De plus en plus d’attraits pour les hiérarchies « horizontales »

De plus en plus de personnes arrivent au stade du jaune. Cependant, il y a une masse critique à atteindre : leur poids doit devenir suffisant pour faire basculer la société civile dans ce modèle, alors qu’elle semble osciller pour l’instant de plus en plus entre l’orange et le vert…

La jeune génération de travailleurs dite « Z » a d’ailleurs de plus en plus d’attraits pour les hiérarchies « horizontales » et les approches collaboratives, dénotant ainsi une évolution au-delà du modèle individualiste. Ils seront 75% de la force de travail d’ici 2025 !

L’intégration honnête des données de la responsabilité sociétale et environnementale correspond donc autant à une nécessité interne qu’à un besoin de crédibilité face à la clientèle ou aux autorités de régulation. Il serait judicieux que ces organisations évoluent d’elles-mêmes et que leurs dirigeants prennent les décisions pour éviter à leur modèle économique de se retrouver face à un désintérêt, voire un boycott, de la société qui signerait l’arrêt de mort de l’entreprise.