Embraer, 3ème groupe aéronautique mondial

Industrie, Innovation 2

L’avionneur brésilien, qui fêtera cette année ses 46 ans d’existence, se place parmi les leaders de l’aéronautique mondiale.

Située à une centaine de kilomètres de Sao Paulo, l’usine d’assemblage d’Embraer fait la fierté de la ville de São José dos Campos. 12000 personnes travaillent sur le site du troisième avionneur mondial, qui a livré en 2014 208 avions civils. Quatre années de production seront nécessaires pour honorer les commandes en cours, augurant des perspectives favorables dans un marché concurrentiel et en relative stagnation.

Volonté gouvernementale

C’est en 1969 que le gouvernement brésilien entérine la création d’Embraer, acronyme d’Empresa Brasileira de Aeronáutica. Le contexte de l’époque se montre particulièrement favorable à la création d’entreprises dans des secteurs jusqu’alors délaissés par l’industrie brésilienne. L’aéronautique fait alors partie des grandes ambitions gouvernementales, et, sous l’égide d’un ministère de l’Air particulièrement volontariste, d’importants capitaux sont débloqués. Les objectifs sont clairement définis ; pas question de concurrencer les principaux avionneurs sur leurs modèles long-courriers, mais plutôt sur le segment du transport régional. Un premier appareil, le Bandeirante, petit-porteur d’une capacité de 20 passagers, est mis au point, et va vite rencontrer un franc succès.

Essor et turbulences

Les années 1970 sont florissantes pour l’entreprise, qui, en plus de ses Bandeirante, propose des modèles d’avions agricoles (EMB 200 Ipanema) et militaires (EMB 312 Tucano). Les appareils d’Embraer, souvent élaborés en partenariat avec des sociétés étrangères, séduisent les flottes du monde entier par leurs innovations et leur robustesse. Le Bandeirante, conçu par l’ingénieur français Max Holste, connait de multiples évolutions, et un avion de chasse, l’AMX, est réalisé avec la firme italienne Aeritalia. Euphoriques, les années 1980 cèdent la place à une décennie moins faste, marquée par la crise qui ébranla fortement l’économie brésilienne. Dans la tourmente, Embraer, menacé de cessation de paiement, est privatisé, vendu aux enchères, et restructuré. La transition s’avère bénéfique pour la compagnie, qui, grâce à Ozires Silva, son président d’alors, rebondit et parvient à s’imposer comme un géant du secteur aéronautique.

Troisième avionneur mondial

La réussite d’Embraer tient au fait que ses dirigeants successifs n’ont jamais dérogé aux objectifs initiaux, à savoir la fabrication d’avions petits et moyens courriers. Cette stratégie a mené l’entreprise à occuper un segment que seul le canadien Bombardier est à même de concurrencer. En forte croissance dans les années 2000, la vente de jets d’affaires a permis à la marque d’enregistrer de multiples commandes et de promouvoir son image à l’international. Peu à peu, ses appareils trouvent leur place au sein de grandes compagnies aériennes, Alitalia, Japan Airlines, Air Canada, Air France, US Airways, American Airlines, British Airways, KLM… Durant cette même période, Embraer devient le troisième fabricant mondial d’avions commerciaux, derrière Boeing et Airbus, et son entrée sur les bourses de New-York et São Paulo en fait immédiatement une blue chip, société réputée chez les investisseurs pour sa fiabilité et sa santé financière.

Stratégie d’expansion

Aujourd’hui, la firme embauche plus de 19000 employés de 20 nationalités différentes, et ses appareils équipent 85 compagnies aériennes dans 58 pays. Plus de 5000 avions ont été livrés depuis la création de l’entreprise, et son chiffre d’affaires a atteint les 5,8 milliards d’euros en 2014. Si, jusqu’en 2012, les chaines de production se situaient uniquement au Brésil, deux nouvelles unités ont été récemment inaugurées au Portugal, pour la fabrication de voilures et de dérives. Cette décision marque la volonté de s’implanter avec encore plus de force sur le marché européen, qui représente 14% des revenus de la firme. La majeure partie des ventes se situe en Amérique du Nord (48%) et au Brésil (21%), le reste étant partagé entre l’Asie, l’Amérique du Sud, le Moyen-Orient et l’Afrique.

Un marché africain sur lequel Embraer entend bien mener une offensive d’envergure, dont les prémices se sont concrétisées en décembre 2014 par la livraison de quatre appareils à Royal Air Maroc. Le trafic aérien africain, dont la croissance moyenne annuelle est évaluée à 8%, intéresse la firme brésilienne, qui a d’ores et déjà vendu 119 avions à 47 compagnies aériennes sur ce continent à fort potentiel.

Perspectives encourageantes malgré quelques difficultés

La publication, le 4 mars dernier, du bilan 2014 a néanmoins tempéré les objectifs affichés par la société. Si sa rentabilité n’est pas remise en question, sa croissance, elle, semble plus problématique. La stagnation des ventes de jets d’affaires, qui représentent 25% de l’activité d’Embraer, a fait reculer le bénéfice net de 20%. Les commandes de modèles haut de gamme enregistrent une baisse sensible, compensée par une hausse des demandes concernant les appareils de taille moyenne, mais qui oblige le constructeur à revoir ses marges à la baisse. La stabilité des ventes d’avions régionaux, qui représentent plus de la moitié du chiffre d’affaires d’Embraer, permettent néanmoins à l’entreprise de conserver des perspectives encourageantes sur le long terme. Sans compter les succès enregistrés par ses avions militaires, dont les ventes s’envolent, passant de 19% à 23% en l’espace d’une année.

L’avionneur, qui fait partie des trois plus grosses entreprises exportatrices du Brésil, devrait encore conserver longtemps sa place sur le podium des constructeurs aéronautiques.