Su Shulin : chute d’un tycoon du pétrole chinois
Su Shulin est une figure emblématique du milieu des affaires et du Parti communiste chinois. Après une brillante carrière dans l’industrie pétrolière, le gouverneur de Fujian a été mis en cause en octobre 2015 pour corruption.
Brillante carrière dans l’industrie pétrolière et au sein du Parti communiste
Né en 1962 dans une famille de paysans de la province de Shandong, au nord-est de la Chine, Su Shulin se spécialise en ingénierie pétrolière et gazière. Il est admis en 1980 à l’Institut Daqing Petroleum et reçoit son diplôme en 1983, puis il obtient sa maîtrise de l’Institut de technologie de Harbin en 1999.
Dès lors, il entame alors une brillante carrière dans le secteur d’extraction de matières premières en Chine et gravit rapidement les échelons. Il commence comme directeur du département pétrole et gaz naturel de PetroChina Company Ltd, et sa réussite lui permettra d’occuper le poste de président de la compagnie dès 1999. Ce succès est doublé par sa nomination au rang de directeur général adjoint et de vice-président de la China National Petroleum Corporation (CNPC) en 2002.
Des débuts remarquables pour Su Shulin, tant professionnels que politiques. Car peu de temps après l’obtention de son diplôme à l’Institut Daqing Petroleum, il décide en 1985 de rentrer au Parti communiste chinois (PCC). Et en parallèle de ses fonctions au sein PetroChina Company, il progresse rapidement au sein du PCC, et il est élu membre suppléant du 16ème comité central en 2002.
Son ascension politique va dès lors s’entrecroiser avec sa carrière dans le milieu pétrolier, et Su Shulin va osciller entre fonctions privées et postes à responsabilité gouvernementale. C’est ainsi qu’en 2006 il quitte ses fonctions à la tête de PetroChina et de la CNPC pour devenir le directeur de comité provincial de Liaoning, se consacrant alors pleinement à son ambition politique.
Toutefois, Su Shulin revient un an plus tard dans l’industrie des extractions des matières premières en acceptant de devenir le P-DG du géant pétrolier Sinopec Corp.[1] En 2007, il cesse donc ses activités en tant que directeur du comité provincial de Liaoning pour réintégrer pleinement l’industrie pétrolière. Connu également sous le nom de China Petroleum and Chemical Corporation, Sinopec est le plus grand groupe pétrolier détenu par l’Etat chinois, au capital de 35 milliards de dollars et côté en Bourse depuis le début des années 2000 (Hong Kong, New York, London et Shanghai).
Su Shulin ne cesse toutefois pas entièrement ses activités politiques, et occupe pendant ce temps à nouveau une position de membre suppléant du 17ème comité central du Parti. En 2011, après quatre ans à la tête de Sinopec, Su Shulin opère un nouveau changement de cap : il démissionne de Sinopec pour accepter le poste de gouverneur la province de Fujian, une des régions les plus prospère de Chine. Il devient ainsi l’un des plus jeunes gouverneurs chinois. Il embrasse alors pleinement sa carrière politique, et en novembre 2012 il est élu membre suppléant du 18ème comité central du PCC.
Su Shulin mis en cause pour corruption, un coup dur pour Sinopec
Haut-fonctionnaire, Su Shulin est très respecté dans le milieu des affaires chinoises et dans les hautes sphères communistes mais il est cependant visé par la campagne anti-corruption du président Xi Jinping. Ainsi en octobre 2015, Su Shulin, alors gouverneur de Fujian, est mis en cause pour corruption par la redoutée Commission centrale de la discipline.
Peu de temps après son arrivé au pouvoir fin 2012, Xi Jinping a en effet lancé la vaste campagne « mains propres » pour lutter contre le « danger moral » de la corruption. La campagne du président chinois a déjà abouti à 12 000 mises en accusations devant la justice chinoise et 230 000 sanctions des membres du PCC. Le secteur pétrolier est particulièrement ciblé par la Commission centrale de la discipline, car des adversaires politiques de Xi Jinping y détiennent ou ont détenu des postes clés. En juin 2015, Zhou Yongkang, un autre tycoon du pétrole qui a été le P-DG de la China National Petroleum Corporation de 1988 à 1998, a été condamné à l’emprisonnement à vie pour corruption.
La Commission centrale a Su Shulin en ligne de mire
La Commission centrale de la discipline mène ainsi une enquête sur les « infractions disciplinaires » de l’ancien dirigeant de Sinopec. Si les accusations venaient à être prouvées, Su Shulin pourrait écoper d’une peine exemplaire d’après les médias chinois.
Wang Tianpu, également un ancien P-DG de Sinopec, a été mis en cause en avril 2015 par la commission de discipline et a été exclu du PCC en septembre 2015. Un coup dur pour Sinopec, qui vient de décrocher la 2ème place au classement des 500 plus grandes entreprises mondiales du magazine Fortune 2015, juste après Wallmart.[2] Avec la mise en cause de deux de ses anciens P-DG, l’image du groupe s’en trouve écornée et sa réputation mondiale entachée.
Malgré sa brillante carrière à un jeune âge dans l’industrie pétrolière et au sein du PCC, la récente mise en cause pour corruption de Su Shulin rappelle qu’en Chine, la réputation des tycoons est indissociable de leurs bonnes (ou mauvaises !) relations avec le Parti communiste.