En Australie, une usine qui donne la mer à boire

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En service depuis décembre 2012, l’usine de dessalement de Wonthaggi, en Australie, cumule les prouesses techniques.

Les superlatifs ne manquent pas pour désigner le site de Wonthaggi, dans l’Etat de Victoria, qui fournit à la population de Melbourne le tiers de ses besoins en eau potable. Plus grande usine de dessalement de l’hémisphère sud, ce projet colossal, mené à bien par un consortium franco-australien, se veut aussi un modèle de développement durable.

Deuxième agglomération urbaine d’Australie, Melbourne a enregistré une hausse de sa population de près de 50% en trois décennies, augmentant d’autant les besoins de la ville en eau potable. En 2007, après onze années de sécheresse, fut décidée la construction d’une usine de désalinisation, appuyée par une campagne médiatique « Our Water, Our Future ».

Deux années plus tard, le marché fut attribué à AquaSure, alliance entre Thiess (compagnie de travaux publics Australienne) et Degrémont (filiale de Suez) pour une livraison prévue fin 2011. Mais les contretemps se sont multipliés : associations de défense de l’environnement redoutant l’impact sur la faune et la flore, riverains mécontents, pluies diluviennes, cyclones, et conflits salariaux ont retardé l’ouverture du site, entrainant un surcoût de 30% pour une usine qui aura coûté au total 2,5 milliards d’euros.

Osmose inverse

Mais la réussite est au rendez-vous, et l’usine fournit pas moins de 450 000 mètres cubes d’eau potable par jour. L’eau de mer est aspirée par de gigantesques tuyaux de 4 mètres de diamètre afin d’être acheminée jusqu’à l’usine, pour passer ensuite à travers des cuves remplies de sable et d’anthracite faisant office de filtre. Puis le sel est éliminé, ce dernier étant rejeté en mer à 1,5 kilomètres du littoral pour ne pas impacter l’environnement. Quant à l’eau potable, elle emprunte 84 kilomètres de pipelines avant d’être stockée et distribuée.

Woman Drinking Glass of Water

Respect de l’environnement

Pour compenser les besoins en électricité d’une telle usine, estimés entre 90 et 120 MW, la mise en place de deux parcs éoliens a été décidée. De plus, une toiture végétale, la plus grande d’Australie, recouvre une partie du bâtiment principal. Malgré toutes ces précautions, le mouvement écologiste ne semble pas convaincu et a lancé de nombreuses actions contre le site. Un mini-scandale a même eu lieu en 2009, lorsque les autorités ont partagé avec AquaSure des données relatives à l’identité des contestataires. Même si l’opposition n’a pas tout à fait désarmé, le groupe joue le jeu de la transparence et il est même possible de visiter chaque jour l’usine et son parc de 225 hectares.

Une vitrine pour Degrémont

Le groupe, leader mondial du traitement de l’eau avec 255 usines en fonctionnement, a bien sûr profité de la réussite d’un tel projet. Mobilisant 600 ingénieurs pour sa conception, employant 52 personnes pour son exploitation et 250 personnes pour vérifier quotidiennement la qualité de l’eau produite, l’usine bénéficie du savoir-faire de cette entreprise vielle de plus de 75 ans. L’attribution de prix tels que « Usine de dessalement de l’année », ou encore le « Prix de l’innovation », parachève le succès de l’entreprise. Une usine dont le groupe sera en charge de l’exploitation et de la maintenance pendant 30 ans.

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Un procédé d’avenir

La désalinisation par osmose inverse constitue une solution d’avenir pour pallier aux besoins grandissants en eau. L’enjeu est donc de première importance pour les régions arides et permet de résoudre les problèmes de manque d’eau potable à moindre frais, puisque cette technique en fait descendre le coût à environ 0,5$ le m³. Fiable et éprouvée, il s’agit d’une industrie en plein essor et dont la capacité installée augmente en moyenne de plus de 10% par an. Une réponse à la problématique de l’eau, qui demeure un enjeu sanitaire et géopolitique majeur du XXIe siècle.