Néolithe : des déchets recyclés en pierres
Néolithe, la start-up angevine fondée en 2019, ne cesse de croître. Installée à Chalonnes-sur-Loire, elle mise sur un créneau porteur : la récupération de déchets et leur transformation en granulats, destinés à la fabrication de routes. Les fondateurs viennent d’ailleurs de recevoir le premier prix des Global Industry Awards, le rendez-vous européen dédié à l’industrie.
William Cruaud, le père de Nicolas, est un ancien maçon tailleur de pierre de 61 ans. C’est lui qui a l’idée de fossiliser les déchets en partant du postulat que les calcaires sont, en fait, les déchets des dinosaures fossilisés. Il soumet ce concept à son fils, alors étudiant à Polytechnique. Ils ont l’occasion de le tester lors d’un « start-up week-end ». C’est là qu’ils rencontrent leur partenaire Clément Benassy, 28 ans, diplômé d’AgroParisTech. L’idée semble plaire au jury : ils décident alors de se lancer dans l’aventure.
Le procédé industriel de Néolithe est révolutionnaire, et bien-entendu breveté : il s’agit de la fossilisation accélérée. C’est donc une troisième voie de recyclage, avec l’enfouissement et l’incinération. « Elle permet de réutiliser les déchets sans créer la pollution que génèrent les incinérateurs et les sites d’enfouissement », explique Nicolas Cruaud, le président de l’entreprise. Il aura fallu près de trois ans à Néolithe pour produire son premier fossilisateur, qui est opérationnel depuis septembre 2022.
Une levée de fonds de 20 millions d’euros
L’entreprise a réalisé en 2022 une levée de fonds de 20 millions d’euros, sa troisième, auprès d’Otium Capital et d’investisseurs familiaux. « Par cette levée de fonds, nous clôturons la phase de démonstration de notre technologie que nous avons débutée en 2019, et entrons dans la phase de déploiement commercial à échelle industrielle. » annonçaient alors les fondateurs.
Celle-ci leur permettra de financer un nouveau site à Beaulieu-sur-Layon, toujours dans la région angevine. Cette usine sera dédiée à la production des fossilisateurs. L’objectif de Néolithe est de produire 24 de ces unités de traitement des déchets non-recylables, chaque unité ayant une capacité de 20 tonnes par jour.
A côté de la production, Néolithe poursuit son travail de Recherche et Développement sur de nouveaux types de déchets. En effet leur procédé actuel de fossilisation est valable uniquement pour les déchets industriels « banals » (DIB). Or l’entreprise ambitionne de traiter dans les années qui viennent tous types de déchets non-inertes et non-dangereux y compris les déchets ménagers.
Pour cela Néolithe envisage un tour de table record de 100 millions d’euros dans l’année à venir. Elle emploie à ce jour 170 personnes et prévoit de terminer l’année 2023 avec 250 collaborateurs.
L’Anthropocite : une empreinte carbone négative
La fabrication des granulats se déroule en plusieurs étapes : les poubelles sont finement broyées, jusqu’à obtention d’une sorte de farine. Celle-ci est ensuite mélangée à un liant minéral, dont la recette est brevetée par Néolithe. Une réaction chimique s’opère alors et minéalise la matière jusqu’à obtention d’une sorte de pâte à modeler. Cette pâte est extrudée sous pression pour composer les fameux granulats.
Appelés Anthropocites, ces granulats peuvent se substituer à des granulats naturels issus des carrières pour une utilisation en béton non-structurel, sans risque technique ou environnemental. L’Anthropocite a une empreinte carbone négative. Ainsi la fabrication et l’utilisation de ces granulats ont un effet positif sur l’environnement.
Néolithe installe ses fossilisateurs auprès de ses clients : régies de traitement des déchets, entreprises de matériaux, qui paient un forfait à la tonne de déchets traités. Ce forfait couvre la maintenance et l’usage de la machine, le liant, ainsi que le contrôle qualité. Une unité traite 10’000 tonnes par an. Enfin, Néolithe commercialise les granulats aux entreprises de BTP. Les clients bénéficient ainsi d’une solution à la fois écologique et moins onéreuse que l’incinération ou l’enfouissement.
A l’heure où l’enjeu environnemental a le vent en poupe, le concept de Néolithe a tout pour séduire, et ses débouchés semblent plus que prometteurs.
Photos : radiofrance.fr –