Transition énergétique : et si la solution était bleue ? Mise en lumière d’Iskandar Safa, PDG de Privinvest

Les énergies marines renouvelables – ou énergies bleues - pourraient devenir la ressource clé dans la lutte contre le changement climatique et pour la croissance.

Les énergies marines renouvelables – ou énergies bleues – pourraient devenir la ressource clé dans la lutte contre le changement climatique et pour la croissance.

Une étude du cabinet de conseil EY présentée au Salon Seanergy de Biarritz en juin 2016 démontre que bien exploitées elles pourraient répondre à l’équivalent de l’ensemble de la demande mondiale en électricité. Pourtant, elles ne comptent à ce jour que pour 0,03% de l’ensemble du parc énergétique mondial. Souhaitant pallier à cet écueil, l’entreprise Hydroquest a décidé de développer l’hydrolien fluvial. Grâce à son partenariat avec le groupe de construction navale Privinvest ils ont ainsi pu lancer le projet ambitieux d’une ferme d’hydroliennes sous marines dans le Rhône. Explications d’Iskandar Safa, dirigeant du groupe Privinvest, spécialisé dans la conception et l’ingénierie navales innovantes, auquel appartiennent les Constructions Mécaniques de Normandie (CMN) qui ont servi à construire les turbines du projet.

L’aventure bleue d’Hydroquest en Rhône Alpes

Dans la course silencieuse qui s’opère pour le développement des énergies marines, la France se démarque par ses actions locales durables. Dernier projet phare en date : l’« Hydroquest River », la ferme hydrolienne d’Hydroquest. La Compagnie Nationale du Rhône (CNR) s’est associée à Hydroquest, le fabricant grenoblois d’hydroliennes, et les Constructions Mécaniques de Normandie détenues par Privinvest pour lancer d’ici 2018 un projet inédit d’hydroliennes sous-marines dans l’aval de Génissiat. L’objectif est de compléter la production d’énergie terrestre pour répondre aux besoins énergétiques de la population locale. Lorsque l’appel d’offres de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) fut publié, Iskandar Safa n’a pas hésité à associer son entreprise à la startup grenobloise ainsi qu’à la Compagnie Nationale du Rhône. La démarche est inédite, audacieuse, et à la mesure du goût du dirigeant de Privinvest pour le défi industriel: “Les Français peuvent se permettre d’être ambitieux en matière de développement des énergies marines”, assure Iskandar Safa. “La France a selon moi un potentiel exclusif non seulement de par sa composition territoriale, mais aussi grâce à l’expertise solide de son tissu industriel ».

“Les Français peuvent se permettre d’être ambitieux en matière de développement des énergies marines. La France a selon moi un potentiel exclusif non seulement de par sa composition territoriale, mais aussi de par l’expertise solide de son tissu industriel.” Iskandar Safa

L’”Hydroquest River” est une initiative d’exclusivité mondiale par son ampleur. Le projet de ferme hydrolienne issu de la collaboration entre la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), HydroQuest et CMN a retenu l’avis favorable de l’ADEME dans le cadre d’un appel à projets sur les investissements d’avenir lancé en 2015. 39 hydroliennes seront fabriquées par les CMN, conçues et développées par Hydroquest, et exploitées par la CNR. Elles seront immergées dans le Rhône afin de produire 6700 MWhs par an. Les bénéfices d’une telle installation sont multiples : assurer l’équivalent de la consommation annuelle de 2700 habitants, renforcer l’expertise industrielle française dans l’hydrolien, et permettre le rayonnement international de la France. Un projet qui suscite l’enthousiasme d’Iskandar Safa. « Nous sommes fiers que Privinvest prenne part à ce projet » explique-t-il, « cette initiative est une première étape vers d’autres projets « bleus » dans lesquels notre groupe souhaite se lancer ».

Le principe d’Hydroquest est simple: exploiter de manière optimale les forces des courants fluviaux pour produire de l’électricité. Des barges flottantes seront ainsi installées sur deux kilomètres, tous les 250 mètres. Sous chacune de ces barges sera implantée une hydrolienne munie d’une turbine, elle-même reliée à un réseau électrique via des câbles immergés sous l’eau. Ce dispositif a été pensé selon un système vertueux. La partie du Rhône qui a été choisie pour déployer cette installation se trouve dans une vallée encaissée peu fréquentée, il n’y aura donc aucun impact sur les transports fluviaux. Par ailleurs les courants animent le fleuve de façon permanente, ce qui assure une source énergétique perpétuelle pour ce type d’installation. Enfin, il est important de souligner que le système d’Hydroquest River a été pensé de manière à ne pas perturber l’écosystème marin, qu’il soit animal ou végétal.

Un chantier en cours de construction : la réponse à une question d’intérêt général

Pour Iskandar Safa, l’intérêt de ces énergies est évident. L’océan qui couvre 71% du globe terrestre reste un vivier intarissable pour la production de ce type d’énergie propre. “La France, rappelle le dirigeant de Privinvest, comprend 11 millions de kilomètres carrés marins en incluant à la fois la métropole et les territoires d’Outre-Mer : un potentiel colossal pour le déploiement de dispositifs marins”.

Les récentes initiatives des autorités publiques qui ont été lancées aux niveaux nationaux, régionaux et mondial vont dans le sens de plus d’énergie durable. Figure emblématique de la diplomatie écologique, la COP 21 a permis de viser un objectif du réchauffement climatique en dessous de 2 degrés. L’Union européenne a adopté à ce titre une stratégie globale pour l’environnement qui s’est notamment traduit en France par la loi pour la transition énergétique dont l’objectif est de réduire de 50% les gaz à effets de serre d’ici 2025. L’utilité de ces mesures publiques est notamment ressentie par les constructeurs industriels.

“La COP21 est une avancée diplomatique unique en faveur du développement durable. Nous y avons vu émerger un consensus global sur l’importance d’agir en faveur de l’environnement pour les générations futures. Privinvest est conscient de ces enjeux, et est prêt à aider à relever ce défi planétaire.” Iskandar Safa

Au-delà de ces initiatives réglementaires, l’investissement public/privé joue un rôle fondamental dans le développement des énergies propres, et plus spécifiquement des énergies bleues. Sur l’ensemble du globe ce sont les européens qui ont pris une position de leadership dans le développement de parcs éoliens. Le Danemark est le premier pays à avoir appuyé sa production énergétique sur les éoliennes marines offshore notamment à travers le déploiement du parc d’Anholt de 111 éoliennes réparties sur 88 km2 de littoral. Plus récemment le Royaume-Uni s’est penché sur la création d’un lagon artificiel au large du pays de Galles qui serait implémenté via un plan d’investissement de 1,3 milliard de livres.

Utiliser l’expertise industrielle pour développer les énergies renouvelables

Malgré l’urgence de la situation climatique et la prise de conscience politique récente liée à ces enjeux, l’écosystème de développement des énergies bleues reste fragile. Les petites et moyennes entreprises ont pris part à l’essor des énergies renouvelables marines pour le développement durable en France depuis quelques années. Néanmoins, force est de constater que par manque d’investissement et de moyens, et avec la lourdeur des charges réglementaires, beaucoup d’initiatives sont stoppées dans leur élan. Dans certains cas les petites entreprises les plus prometteuses sont rachetées par de grands groupes, mais cela ne représente qu’une proportion minoritaire.

“Les grands groupes industriels doivent jouer un rôle dans le soutien de l’économie bleue” lance Iskandar Safa. Les grandes entreprises internationale permettent aujourd’hui d’investir et de commercialiser ce type d’équipement ou encore réaliser des partenariats avec les autorités publiques pour l’installation des énergies marines dans des territoires clés. Iskandar Safa rappelle à cet effet les investissements en recherche & développement effectués par les Constructions Mécaniques de Normandie pour accroître le potentiel des chantiers navals de Cherbourg.

Le potentiel énergétique marin doit donc être exploité par une action conjointe de tous les acteurs : publics, privés, chercheurs, scientifiques, etc. Les gains pour les hommes et la planète sont réels et les enjeux sont aujourd’hui colossaux” conclut l’industriel convaincu que la mer est l’avenir de la terre.

 

A propos d’Iskandar Safa :
Iskandar Safa est un homme d’affaires franco-libanais. Il est le PDG du groupe d’ingénierie et de construction navale Privinvest, actuellement leader de son secteur en Europe et au Moyen-Orient. Il détient également les Constructions Mécaniques de Normandie depuis les années 1990.
Iskandar Safa est diplômé de l’Université américaine de Beyrouth et de l’INSEAD de Fontainebleau.