Collapsologie : le pire est-il vraiment à venir ?

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Collapsologie. Depuis quelques années, le mot s’est invité dans les débats télévisés, s’affiche sur les réseaux sociaux et orne les présentoirs des librairies au rayon « Meilleures ventes ». Si le terme n’a été utilisé pour la première fois qu’en 2015, la préoccupation qu’il recouvre n’est, elle, pas nouvelle. Du latin « collapsus » (s’écrouler), la collapsologie désigne l’étude de l’effondrement de la civilisation industrielle dans laquelle nous évoluons. De nombreuses leçons pourraient en être tirées, permettant d’amortir ainsi quelque peu la chute qui nous guetterait.

Rien ne va plus

Les voyants sont au rouge. C’est, du moins, ce que prétendent de nombreux scientifiques et observateurs qui, données à l’appui, dressent la liste des maux qui affligent notre planète. Et le fait est qu’il est souvent bien difficile de leur donner tort. Quelques exemples ? Notre usage sans limite des ressources non-renouvelables qui nous rend dépendants de combustibles fossiles et de métaux rares amenés à disparaître. Les pics de production ayant d’ores et déjà été atteints pour nombre de ressources, notre système industriel se trouverait donc menacé à moyen terme.

Autre sujet de préoccupation majeure pour les collapsologues : l’interdépendance de l’économie mondiale qui fonctionne à flux tendus dans des secteurs aussi vitaux que l’alimentation ou les biens de première nécessité. Cette économie interconnectée à outrance n’est pourtant pas à l’abri d’une crise qui, selon les observateurs les plus pessimistes, pourrait être bien pire que celle essuyée en 2008. 

La quête inlassable d’une perpétuelle croissance économique considérée comme seul et unique but constituerait aussi un facteur de fragilité montrant ses limites. A cela se rajoutent l’extinction des espèces et les menaces planant sur les écosystèmes, la réalité du changement climatique et de ses impacts, ainsi que les risques d’épidémies, qui constituent autant de menaces capables de provoquer un effet domino dévastateur pour notre civilisation.

Alarmistes, mais pas fatalistes

Cet état des lieux anxiogène devrait préparer l’humanité à des changements paraissant inéluctables mais dont les effets pourraient néanmoins être anticipés par des réactions adéquates. Car si la collapsologie n’apporte pas de réponse, son utilité réside autant dans les constats qu’elle pose que dans les perspectives sociétales qu’elle ouvre. Tel est, du moins, le message que tentent de faire passer les principaux tenants de la théorie. 

Parmi eux, Pablo Servigne et Raphaël Stevens, auteurs du best-seller « Comment tout peut s’effondrer », premier essai à aborder le thème en profondeur et de manière transdisciplinaire. « Il peut y avoir un sursaut incroyable très rapidement, on a une puissance extraordinaire », confie Pablo Servigne qui mise sur une réaction de tous les acteurs concernés par ce scenario de l’effondrement tant parmi la société civile qu’au sein de la classe politique.

Une opportunité pour l’humanité ?

Pour les tenants d’un effondrement à court terme, un collapsus de notre civilisation serait une opportunité à saisir afin de gommer les défauts d’un mode de vie jugé intenable. Une sorte de remise à zéro qui permettrait de repartir sur des bases plus saines, prônant un retour vers la sobriété, l’entraide et le respect de la nature. En cela, des initiatives individuelles sont d’ores et déjà non seulement possibles, mais en cours de réalisation. Les objectifs de ces dernières ne visent pas seulement à réduire les impacts sociétaux jugés néfastes : il s’agit aussi de créer un contexte au sein duquel les soubresauts d’un effondrement seraient réduits au maximum. 

L’optimisme pourrait aussi être de mise quant au rôle des citoyens qui réclament une prise de conscience des risques à venir lors des marches sur le climat ou, plus récemment, lors de « L’affaire du siècle », cette action en justice contre l’État français qui a recueilli plus de deux millions de signatures. 

Lutte et résilience vont donc de pair avec le discours des collapsologues pour qui le pire des dangers ne serait en somme pas l’effondrement de notre civilisation, mais bel et bien le déni de réalité empêchant toute prise en compte des dangers qui nous attendent.