Automobile : les concurrents de Tesla aiguisent leurs prototypes
Précurseur, avant-gardiste, innovant, luxueux… le constructeur automobile américain Tesla cumule les superlatifs élogieux depuis sa création en 2003. Présentant des modèles très en avance sur leur temps, la marque a su se forger une place de numéro un sur le segment des véhicules 100 % électriques. Pourtant quelques warnings se sont récemment mis à clignoter pour l’entreprise de Palo Alto qui, en plus de problèmes internes, doit affronter une concurrence de plus en plus acérée. Deux outsiders, Faraday Future et Byton, souhaiteraient venir contrecarrer les ambitions de la firme d’Elon Musk. A quel point ces deux constructeurs peuvent-ils jouer les trublions, et parviendront-ils à se tailler une place dans un secteur chaque jour plus concurrentiel ?
Faraday Future, la niche du très haut de gamme
Le prototype FFZERO1, véhicule ultra-sportif présenté au CES de Las Vegas en 2016, avait échauffé les esprits. Un an plus tard, le constructeur présentait, toujours au même salon, le FF91, concept-car bourré de technologies dernier cri et dont la fiche technique promettait des performances allant bien au-delà des meilleurs modèles proposés par Tesla. L’arrivée de Faraday Future (FF) allait-elle signifier la fin du monopole exercé par l’entreprise d’Elon Musk ? Las, les difficultés se sont depuis accumulées sur le jeune constructeur américain.
Fondée en 2014, la firme s’est pourtant fixé des objectifs tout à fait cohérents : en proposant un véhicule aux alentours de 150.000 dollars, FF entend se positionner sur une niche que semble, au contraire, négliger Tesla. Ce dernier, qui avait justement débuté son aventure automobile en proposant un roadster en édition très limitée, vise comme objectif une démocratisation de ses modèles, dont les tarifs deviennent enfin abordables.
En visant le marché limité, mais très lucratif du luxe, FF simplifie aussi les démarches de construction. Aux grosses et couteuses chaines d’assemblage, FF substitue une fabrication où presque toutes les opérations sont réalisées à la main. Autre particularité : la marque se passe de tout concessionnaire, privilégiant des ventes qui se feront exclusivement via Internet. Avec ses 400 employés, Faraday Future ne joue clairement pas dans la même cour que Tesla, ce qui représente un avantage certain pour cette start-up aux ambitions non dissimulées.
Une route semée d’embuches
Alors que les premières livraisons du FF91 sont attendues pour la fin de l’année, plusieurs tempêtes ont cependant secoué l’entreprise. Parmi celles-ci, de graves difficultés de trésorerie, l’abandon d’un projet d’usine d’assemblage et des accusations de malhonnêteté portées à l’encontre de son ancien P-DG. Principal investisseur, le milliardaire Jia Yueting est quant à lui criblé de dettes et ses avoirs en Chine ont été gelés à la suite d’une affaire retentissante et riche de rebondissements. Ce qui n’a pas empêché FF de réaliser tout récemment, le 25 juin, une belle levée de fonds de deux milliards de dollars conditionnée cependant à certains impératifs.
De son côté, Byton semble mieux placé pour venir empiéter sur les plates-bandes de Tesla. Basé à Nankin, le constructeur chinois compte dans ses équipes de nombreux ingénieurs expérimentés, transfuges de BMW, Tesla, et même FF. Créée en 2018, l’entreprise souhaiterait positionner ses véhicules sur le marché de l’entrée de gamme. Leur SUV présenté au CES devrait concurrencer le Model X de Tesla et sera vendu aux alentours des 45.000 dollars (soit à peu près 40.000 euros), contre 79.500 dollars pour le Model X.
Appartenant au géant des communications Tencent, Byton possède d’ores et déjà de nombreux atouts : les fonds de la maison-mère financent actuellement la construction d’une gigantesque usine capable de produire plus de 800 véhicules par jour et, surtout, un marché chinois premier au monde dans le domaine des ventes de voitures.
Et si le principal rival de Tesla était… Tesla ?
Prévu pour fin 2019, le SUV de Byton devra faire ses preuves, d’autres compétiteurs moins médiatiques mais tout aussi acérés venant s’agréger au marché des véhicules 100 % électriques. Outre les acteurs institutionnels, comme Nissan ou Jaguar, quelques petits poucets, tels que SF Motors, entendent bien s’affirmer sur le créneau. Ces constructeurs seront-il capables de faire vaciller Tesla de son piédestal ? La firme californienne ne semble quoi qu’il en soit plus en état de grâce, et accumule même de sérieuses difficultés.
L’entreprise, qui n’est jamais parvenue à se montrer bénéficiaire, a accusé en 2017 un déficit d’un montant de 2,2 milliards de dollars. Difficultés de production, accidents liés au système d’assistance au pilotage, vague de licenciements, chute du cours des actions et, dernièrement, controverse provoquée par les prises de parole choquantes de son charismatique, mais bouillonnant P-DG sèment le trouble quant à la viabilité d’une entreprise dont l’image de marque commence à pâtir de ces aléas. Simples turbulences provisoires ou fin d’une hégémonie ? Les douze prochains mois seront en tout cas décisifs non seulement pour l’entreprise d’Elon Musk, mais aussi pour toute la filière des véhicules électriques.