Google et les réseaux sociaux, une longue liste d’échecs
Google est un mastodonte. Les succès de son moteur de recherche, de ses services de cartographie, de sa messagerie, de sa plateforme de vidéos en ligne ou encore de son système d’exploitation pour mobiles en font un acteur incontournable du numérique, qui détient dans certains secteurs une situation de quasi-monopole. Mais il est un domaine dans lequel la firme de Mountain View n’est jamais tout à fait parvenue à percer : celui des réseaux sociaux. Passage en revue de ces diverses tentatives et des raisons ayant mené à leur échec.
Qui se souvient d’Orkut, de Dodgeball, de Jaiku et de Lively ?
En 2004, l’accès au Web s’est assez démocratisé pour qu’apparaissent les premiers réseaux sociaux. Un an auparavant, Myspace avait donné le ton, le site ayant attiré dès les premiers mois de son lancement des dizaines de milliers de bloggeurs. Google décide alors de se lancer dans la course en inaugurant son propre réseau social baptisé Orkut. Mais le site ne parvient pas à séduire et se retrouve écrasé entre le succès grandissant de Myspace et l’arrivée d’un redoutable outsider dénommé Facebook. Seuls l’Inde, la Turquie et surtout le Brésil réservent un accueil favorable au réseau qui fermera finalement ses pages en 2014, le faible nombre d’utilisateurs entraînant par ricochet une cruelle absence de contenu.
En 2005, soit une année après le lancement d’Orkut, Google rachète Dodgeball, un service permettant à ses utilisateurs géolocalisés de partager des informations sur les lieux qu’ils fréquentent. Précurseur du désormais célèbre Foursquare, Dodgeball est victime du manque d’intérêt que lui témoigne sa maison-mère, et ferme en 2010 dans l’indifférence générale.
En 2006, Google tente de réagir à l’arrivée de Twitter en faisant l’acquisition de Jaiku. Cette plateforme de microblogging sera elle aussi un échec cuisant, incapable de lutter efficacement contre son concurrent direct. A la fin des années 2000, le succès du logiciel Second Life amène Google à tenter sa chance avec Lively qui n’aura vécu que l’espace de quelques mois, entre juillet et décembre 2008, par faute d’une interface déplorable.
Du Wave, du Buzz et du +
Loin de se décourager, Google décide de s’engager plus sérieusement dans ses projets de réseaux sociaux et collaboratifs. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient le service Wave, créé en 2009. Mixant les fonctions de messagerie, de chat, de réseautage social et de partage de documents, la plateforme, trop ambitieuse, se révélait à l’usage d’une complexité telle que bien peu d’utilisateurs se sont donné la peine de persévérer dans son usage. Il n’aura fallu qu’une seule année d’existence pour que la firme se décide à clôturer ce service.
Google Buzz, qui lui a succédé, n’a pas eu plus de chance : les informations postées par les internautes inscrits sur le site étaient toutes accessibles publiquement. D’où le tollé qui a résulté de certaines indiscrétions rendues possibles par ces paramètres par défaut, qui ont même déclenché aux Etats-Unis quelques class actions retentissantes. Le service est arrêté en 2010 pour laisser place au grand-œuvre, Google+, annoncé comme le fossoyeur de Facebook. Inauguré en grandes pompes en 2011, le site, qui totalise 2,5 milliards de membres grâce à un système d’inscription forcée, est pourtant un échec retentissant, bien incapable de menacer l’hégémonie du site de Mark Zuckerberg. Plus grand fiasco de Google dans le domaine des réseaux sociaux, cette tentative marquera durant un temps la fin des ambitions de la firme dans un secteur désormais très concurrentiel.
Les raisons de l’échec
Comment interpréter cette succession de flops au sein d’une entreprise disposant des meilleures ressources, tant intellectuelles que financières ? La première raison voudrait que Google soit souvent intervenu trop tard, alors que ses concurrents étaient déjà bien implantés. Tel est le cas, notamment, d’Orkut, mais aussi de Jaiku ou encore de Google+. Lorsqu’elle se montrait précurseur, l’entreprise a souvent péché par des interfaces trop complexes ou, pire, non finalisées.
Si cette succession de déconvenues confirme la faiblesse de Google dans le domaine des réseaux sociaux, ces tentatives témoignent pourtant d’un continuel esprit d’innovation et d’une culture d’entreprise dans laquelle l’échec ne constitue pas un écueil dramatique. La firme n’a que peu souffert financièrement de ces déboires, et quelques fonctions issues des défunts services ont trouvé leur place parmi d’autres applications à succès. A l’heure actuelle, Google peut se targuer de faire fonctionner 70 services qui, eux, se portent à merveille.