Ikea pense la maison de demain

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La science-fiction nous a abreuvés depuis des décennies d’images, d’idées, de délires parfois, sur le foyer du futur. Peuplé de robots serviteurs, d’intelligences artificielles et de meubles automatisés plus ou moins envahissants et dialoguant directement avec le locataire, l’habitat fantasmé dans l’art d’anticipation n’avait jusqu’alors pas vraiment pris forme concrète dans notre quotidien. Les étagères du commun des mortels sont toujours constituées de planches sur lesquelles on pose des objets, la grande majorité des frigidaires se contentent de produire du froid et nos miroirs reflètent encore cruellement la réalité de nos faciès matinaux. Mais voici venir le mastodonte Ikea, qui pourrait bien changer la donne.

La domotique, une discipline déjà féconde

La domotique, pas celle magnifiquement illustrée par Jacques Tati son film « Mon Oncle » en 1958, mais cet ensemble de techniques bien réelles qui vise à implanter et gérer des systèmes automatisés dans nos maisons, existe depuis déjà longtemps. On peut estimer sa naissance aux années 80, lorsque la miniaturisation des composants électroniques et informatiques a commencé à se développer à grande échelle. Mais c’est l’essor d’Internet puis du WiFi et des différentes techniques de connectivité dans les années 90 et 2000, qui sonneront le vrai départ de la course à l’habitat inter et intra-connecté.

Dès lors, c’est une myriade de petites sociétés très innovantes qui va se lancer dans la recherche et le développement de techniques et de supports destinés à faire passer nos meubles dans la modernité. Apparaitront ainsi les premiers systèmes de contrôle d’équipements à distance, l’électroménager et l’ameublement capables de traiter des données numériques ou encore la gestion automatisée des économies d’énergie.

Cependant, le trop grand nombre et la petite taille des producteurs et des interfaces de gestion, ainsi que la nature même des objets concernés, a maintenu le coût et le degré de complexité de tels équipements à un niveau beaucoup trop élevé pour le grand public. C’est pourquoi l’entrée d’Ikea dans la danse de la domotique pourrait changer bien des choses.

Ikea : une capacité d’investissement et d’uniformisation faramineuses

L’omniprésence du géant suédois dans nos maisons est connue de chacun, et pour cause : plus de 34 milliards de chiffre d’affaires en 2017, 149.000 employés et 355 magasins de par le monde, 700 millions de visiteurs en 2012, 45 millions d’exemplaires vendus la même année pour l’article le plus populaire (une étagère)… Dans bien des pays, Ikea est présent dans chaque salon, chaque chambre, chaque cuisine et salle de bains. C’est donc bien évidemment l’acteur idéal pour absorber et rentabiliser les énormes coûts de recherche et développement induits par ces équipements, et c’est bien naturellement qu’il se penche très sérieusement sur le sujet, aidé par ailleurs par l’essor du smartphone et de ses applications.

Que nous réserve celui qui n’était jusqu’alors qu’un vendeur de meubles, et qui s’apprête à devenir bien plus que cela ? Les luminaires sont déjà concernés, avec le lancement en 2017 d’une ampoule dont on peut régler la puissance et la couleur depuis son téléphone. Une lampe de bureau est, quant à elle, capable de recharger ledit téléphone par induction en le posant simplement sur le socle de la lampe, sans aucune connexion filaire. Une enceinte connectée parfaitement adaptée à la taille des meubles du fabricant est aussi déjà en vente.

Plus spectaculaires, des innovations dans l’univers de la cuisine se préparent à intégrer notre quotidien. Aidé d’un cabinet et de chercheurs en design notamment, Ikea envisage pour 2025 une cuisine connectée support de nombreuses applications de réalité augmentée : un plan de travail affichant des recettes et des données diététiques sur les aliments posés dessus, un placard de rangement identifiant ce qu’il contient et le conservant à une température adaptée, un évier gérant eaux propres et eaux usées… L’imagination est la seule limite.

Quel impact sur nos vies ?

Nous commençons seulement à mesurer la profonde influence d’un objet comme le smartphone sur notre comportement, nos réflexes, notre sociabilité, notre culture, pour le meilleur comme pour le pire. Qu’en sera-t-il lorsque l’ensemble de notre univers immédiat sera lui aussi connecté en permanence, sous la houlette de puissantes compagnies internationales ? Que la réponse soit réjouissante ou non, elle s’imposera d’elle-même, lentement mais sûrement.